1er juillet 2009, naissance de Joséphine. Le doute et les peurs se mêlent à la joie et à la fierté. Avoir un enfant peut être la chose la plus simple du monde. Pour nous, ce fut long, improbable, unique. À la maternité, ils appellent cela une « grossesse précieuse ». C'est aussi un déséquilibre annoncé à notre vie de couple, une histoire d'amour à deux à reconstruire à trois.
Depuis ce moment, je photographie notre famille. Naturellement, avec l'appareil qui me vient sous la main, Les planches contacts s’empilent. Apparaissent alors des photos qui vont à l'inverse d’une photographie de famille qui, comme Bourdieu la qualifie, « n’est conviée que pour ces bons moments qu’elle transforme en bons souvenirs ». Je gardes ces photos, celles où l’étrangeté transpire comme celles où la magie de l'enfance l'emporte.. La série se construit, mais la suite devient moins spontanée : je cherche la bonne photo. Alors j’arrête.
Joséphine a 10 ans aujourd'hui et les doutes se sont dissipés. L'amour est une évidence. La peur de la mort en est une autre. Je vis avec les deux. Les années passent, avec la crainte qu'elles viennent effriter notre cocon familial. Je reprends l'appareil. Je photographie Joséphine, dans une lutte qui semble perdue d'avance, pour qu'elle ne m'échappe pas trop vite, pour que la fusion douce et amoureuse de ce microcosme à trois perdure. J'y ai trouvé ma place. Le temps passe et je peux enfin dire que plus rien ne s'oppose à la nuit, rien ne justifie… et qu'il me reste tout à oser.